BENOÎT DELBECQ 4

Description

“Si nous pouvions soulever les pierres qui jalonnent le chemin du voyage musical et humain de Benoît Delbecq alors nous y verrions sans doute l’empreinte de ces Gentle Ghosts qui donnent le titre à l’album.
Le monde rythmiquement complexe mais fluide créé par Delbecq et qui convoque aussi bien l’esprit des pygmées Aka, que celui de Gyorgy Ligeti, puissants alliés eux-mêmes d’esprits immémoriaux, au recours à la technique de  “remix-in situ”  qui nimbe mystérieusement l’ensemble du disque, les Gentle Ghosts-gentils fantomes- habitent décidément comme autant de bons génies ces sillons creusés au fur et à mesure.
L’électronique utilisée ici avec une heureuse et convaincante parcimonie ajoute à la magie d’une musique décidément hors du temps mais résolument d’aujourd’hui.
La puissance du chant toujours à l’œuvre dans le contrepoint dessiné par le piano et par le ténor essentiel de Mark Turner, vole avec légèreté au-dessus de l’ensemble propulsé avec groove et liberté par la paire rythmique majeure constituée de John Hébert et Gerald Cleaver.
Parfois on peut sentir l’ombre vivante de Mal Waldron à un détour de chemin. Au coin d’un autre, on devine l’empreinte imaginaire de Steve Lacy quand ce n’est pas la haute stature de Paul Bley qui semble planer au-dessus de nous.  Parfois encore, c’est le dos de la main de Don Pullen qui semble habiter la main droite de Delbecq et qui vient fouetter une fin de phrase comme pour mieux la suspendre.
Mais au-delà de ces influences certaines comme autant de mémoires cumulées, c’est la singularité de la musique du pianiste, sa pensée musicale, son écriture, sa manière unique d’habiter l’héritage donc de le rendre vivant en le maintenant en mouvement qui continue à nous surprendre.
Discrètement mais avec détermination depuis une trentaine d’années, Benoît Delbecq influence lui-aussi à son tour ce que sera le jazz, demain.”

Philippe Ochem